mardi 20 décembre 2016

PRESENTATION

Bonjour,

Aujourd’hui, je souhaite vous faire partager ce roman : Celui-qui-doute.


Cet ouvrage, très actuel par bien des aspects, nous parle avec beaucoup d’humanité des déchirures d’un peuple trop longtemps opprimé, de problèmes identitaires, de foi et d’espoir… et nous propose en prime une nouvelle théorie de l’évolution humaine !
Mais n’anticipons pas ! Commençons par vous présenter ce livre…

La trame se déroule quelque part dans les Grandes Plaines de l’ouest américain.
Le héros est un jeune natif américain élevé dans un premier temps dans une réserve par son grand-père, puis plus tard, retrouvant ses parents, dans le monde «civilisé» de la grande ville. En grandissant, cette dualité est devenue de plus en plus difficile à assumer : tiraillé entre ces deux éducations diamétralement opposées, dans lesquelles il n’a jamais manqué d’amour mais qui l’ont privé de véritables repères, notre héros ne sait tout simplement pas qui il est.
Pour reprendre le contrôle de son existence, c’est vers ses racines lakotas qu’il se tourne, choisissant de s’isoler dans une grotte afin d’y effectuer une haŋbléčheya, ce rituel initiatique que les Blancs connaissent mieux sous le nom de « quête des visions ».
Haŋbléčheya est une pratique ancestrale qui consiste à se retirer du monde pendant quatre jours, dans un lieu sacré, sans manger ni même se désaltérer, dans un isolement total, propice à une distanciation de la réalité quotidienne. Cette période de jeûne et de privations sensorielles est mise à profit pour implorer Wakȟáŋ Tȟáŋka, le Grand Esprit, et invoquer les forces spirituelles qui dorment au plus profond de soi jusqu’à ce que, à bout de forces et à la limite de l’inconscience, survienne enfin une vision qui deviendra votre totem et  vous accompagnera tout au long de la vie.
Grâce à cette expérience extrême, le héros espère être honoré de la présence de Wakȟáŋ Tȟáŋka, pour ainsi renouveler sa foi et retrouver les croyances de son peuple.
Mais comment avoir la certitude que cette vision qu’il attend est bien la personnification d’une instance supérieure, et non simplement l’expression de son propre inconscient ?
Rien de plus simple : il suffit de lui proposer de résoudre une énigme dont personne ne connait la solution et à laquelle, de ce fait, seul un être omniscient pourrait répondre…
Alors survient la rencontre avec son (très surprenant !) totem, venu lui parler au nom du Grand Esprit.
Et brusquement, le roman s’ouvre sur un autre chemin, plus hasardeux et plein de surprises inattendues : la résolution de l’énigme. – Car Wakȟáŋ Tȟáŋka, ou plutôt son incarnation dans la vision de notre héros, propose un nouveau deal à celui qui est venu le tester : « Je te donne les pièces du puzzle, mais c’est à toi qu’il reviendra de les assembler ! »
L’énigme ? En fait, il s’agit tout simplement d’expliquer ce qui a conduit notre espèce vers la voie de l’humanité.
Et nous voici partis sur les pas de nos ancêtres, afin de comprendre ce qui a poussé un jour un primate arboricole à adopter la bipédie…

« Celui qui doute » est avant tout un roman sur les natifs américains.
Il nous fait partager les valeurs fondamentales des lakotas, décrit leurs rituels cérémoniels, évoque les génocides perpétrés à leur encontre par les premiers colons ou encore la crise identitaire rencontrée de nos jours par les descendants des survivants. Dans cette fresque qui nous dévoile l’anomie d’un peuple traumatisé et qui souligne l’acculturation du héros, tout se met progressivement en place pour expliquer l’état d’esprit de celui-ci, son besoin de se retrouver et son désir de changer les choses…
« Celui qui doute » touche le lecteur par l’humanité de ce jeune amérindien et par les espoirs presque désespérés qu’il met dans sa quête, à la fois pour se construire lui-même et pour reconstruire l’âme de son peuple.
Au cours de cette aventure et au fil des pages, tandis que la faim et la soif acheminent peu à peu le héros vers sa rencontre avec Wakȟáŋ Tȟáŋka, l’auteure embrasse, en de belles envolées lyriques, la complexité des sentiments du jeune homme, sans cesse partagé entre l’euphorie de sa quête, ses doutes et la peur d’échouer ; elle égrène des anecdotes pleines de sensibilité sur son enfance, exalte les péripéties de son cheminement, ou bien encore nous fait découvrir l’histoire et les croyances de son peuple.
Elle nous bluffe par l’élégance de son style, souvent poétique, pour ne pas dire harmonieux, tandis que la subtilité du portait psychologique et affectif de son héros et l’utilisation dans le récit de la première personne du singulier contribue à l’empathie.

Mais « Celui-qui-doute » est également un roman sur l’hominisation, un prétexte de la part de l’auteure pour nous proposer une nouvelle théorie de l’évolution humaine.
De fait, Emmanuelle Bessot aborde tout d’abord et avec beaucoup de pédagogie différentes théories de l’évolution… qu’elle lapide sans concession pour pouvoir laisser le champ libre à son propre crédo !
Elle nous embarque alors dans les délires du héros pour disposer ici et là les pièces disparates du fameux puzzle, titillant sans cesse la curiosité du lecteur et lui apportant, sans en avoir l’air, tout un tas de connaissances nouvelles.
Nous découvrons ainsi un récit d’une très grande richesse, résolument moderne, pour ne pas dire innovant, à la fois ludique et instructif.
Quant à sa théorie – en attendant de pouvoir être validée par la communauté scientifique ( ?) – elle a en tout cas le mérite d’être crédible et tout à fait pertinente...





ENTRETIEN AVEC L'AUTEUR

Michelle : Bonjour, Emmanuelle.
J'ai été très agréablement surprise par ce roman ! Je suis subjuguée par la richesse des descriptions, autant en ce qui concerne celles des "décors" que celles des sentiments ressentis par le héros. Je vous félicite pour ce travail d’investigation sur les origines de l'homme. Malgré un sujet que je dirais "compliqué", vous avez su nous le faire découvrir et partager votre "théorie" d'une façon agréable !
En fait, le caractère scientifique est tellement bien intriqué dans le romanesque qu'on ne sait pas exactement où s’arrête la fiction…  Du coup, on se demande si les informations proviennent de sources de recherches sérieuses de bout en bout ou bien si une part d’imagination prend le pas dans cette théorie de l’évolution.- Mais c’est peut-être là tout le pouvoir évocateur de ce livre… ?


Emmanuelle Bessot : (sourire) J’espère que c’est le cas, oui. Mais en dehors de son pouvoir évocateur, ce livre est très sérieux.
En fait, j’ai développée cette théorie de l’évolution humaine il y a plusieurs années ; j’ai eu envie de la faire connaître et j’ai tenté de la faire publier sous le titre de « La légende de Pinocchio ».
Il s’agissait d’un travail méticuleux, intelligemment argumenté et solidement étayé. J’avais bien conscience que le texte était complexe et parfois même fastidieux, mais je pensais dans ma grande naïveté que la communauté scientifique ne pouvait pas passer à côté d’une théorie aussi logique, d’autant que la thèse d’Yves Coppens, l’East Side Story, commençait alors à prendre l’eau de toute part  !!!  - C’était mal connaître le monde de l’édition…
J’ai quand même été recontactée par un éditeur qui souhaitait savoir qui j’étais. En réalité, cette personne voulait savoir si j’étais anthropologue. Quand je lui ai répondu que j’étais « juste » une maman au foyer, ça a été plié ! Rangé au placard ! - Je n’avais tout simplement pas la légitimité pour m’exprimer sur le sujet…
Ce qui est idiot d’ailleurs parce que les anthropologues n’ont accès à rien d’autre qu’aux os. Et un être vivant, c’est tout de même bien plus que cela ! C’est de la chair, des organes, des hormones, des influx nerveux ! Des relations sociales, aussi... – Autant de données sur lesquelles les anthropologues n’ont justement aucune prise. Et en l’occurrence, ils n’expliquent pas le foisonnement d’hominidés qui se déploie sur tous les fronts du continent africain à l’aube de l’humanité !
Ma théorie, elle, explique tout cela.
Michelle : Alors justement, quelle est-elle, cette théorie ?
Emmanuelle : Hé bien, sans vouloir trop éventer le fil de ce roman, je dirais que si notre ancêtre primate s’est mis debout, c’est à cause d’une modification anatomique précise.
Cette théorie, logique et évidente, s’inscrit dans l’œuvre d’André Leroi-Gourhan, l’un des précurseurs à soutenir que l’humanité a « commencé par les pieds » (1)
Là dessus, j’émets une hypothèse pour expliquer l’origine de cette modification : une certaine pratique rituelle. Ici, en revanche, ce n’est qu’une hypothèse ; il pourrait y avoir d’autres explications (une maladie, le stress,…). Mais cette hypothèse, cette pratique rituelle, a le mérite d’expliquer la généralisation de cette modification anatomique à toute une population et que cette généralisation se soit perpétuée dans le temps.
Michelle : Et concernant les Lakotas ? Quelle est la part de fiction et de réalité ?
Emmanuelle : Tout ce qui se rapporte à leur histoire, à la description de leurs rites et aux pensées de ce peuple est conforme à ce que j’en sais. En revanche, la route vers le sanctuaire, la description du lieu sacré où le héros accouchera de sa vision et les anecdotes liées à sa vie ne sont que pure fiction.
Michelle : Vous êtes une passionnée ?
Emmanuelle : Je ne sais pas si c’est le mot juste. Il y a encore cinq ans, je ne savais pas grand-chose des natifs américains. J’ai été amenée à potasser le sujet dans le cadre de la rédaction de ce livre, pour lui donner plus de profondeur, plus de consistance.
Et là, ça a été une véritable révélation…
Je suis littéralement à genoux devant leur mode de pensée, devant leur noblesse et leur générosité. Je suis atterrée par ce que mes semblables leur ont fait subir, par ignorance, par bêtise et surtout par cupidité. Et si j’avais la moindre once de spiritualité en moi, c’est vers leurs croyances que je me tournerais, très certainement !
En fait, au départ, ce livre n’était qu’un prétexte pour pouvoir y instiller ma théorie de l’évolution et me permettre de la diffuser vers un plus large public, mais très vite, c’est devenu plus que cela.
Plus j’en apprenais sur le peuple de mon héros, plus je m’attachais à lui.
J’ai vraiment aimé écrire ce livre. J’espère que les lecteurs aimeront le lire…
Michelle : On dit souvent que les auteurs s’identifient à leur personnage. Est-ce que votre héros vous ressemble ?
Emmanuelle (rire) : Alors là, je pense que tous ceux qui me connaissent seront très étonnés par ce livre et par la personnalité de mon héros : il est exactement à l’opposé de ce que je suis ! A 180 degrés, ni plus, ni moins !
Mon héros est plein de doutes ; je ne suis que certitudes.
Il est ouvert au mystique ; moi, je suis profondément athée et je ne crois que ce que je vois.
Il espère rencontrer Wakȟáŋ Tȟáŋka, le Grand Esprit, et pense que cela le réconciliera avec les siens ; moi, j’ai appris à ne compter que sur moi-même.
Enfin, mon héros a eu la chance d'avoir une enfance parfaitement épanouie, entouré de l’amour de tous les siens, et paradoxalement cela l’a fragilisé.
Non, vraiment, rien de commun avec moi…


Michelle : Et en ce qui concerne Philippe, son meilleur ami ?
Emmanuelle : Oui, la douleur de Philippe et la manière dont il se réapproprie sa souffrance sont beaucoup plus proche de mon propre vécu, même si son histoire n’est pas la mienne. Et même si son histoire me touche personnellement et profondément.
Non, vraiment, à part ça, je crois que je ne dévoile rien, ou en tout cas pas grand chose de moi dans ce livre.
(sourire :) Peut-être dans le prochain ?

(1)      Leroi-Gourhan : Le Geste et la Parole, I. Technique et langage. Albin Michel, Paris, 1964).

lundi 19 décembre 2016

TROUVER UN EDITEUR N'EST PAS CHOSE FACILE.


L'AUTEUR NOUS RACONTE SON CHEMINEMENT :


«Ma quête d’un éditeur a commencé pour ce manuscrit début janvier 2016,… sans grande conviction, je dois l’avouer, consciente des réalités du monde de l’édition : totalement saturé par les publications de célébrités en tout genre, du show-biz au politique, par les rééditions ou encore par les ouvrages d’écrivains déjà révélés.

Car les faits sont bien là : pour un auteur totalement inconnu, sans la moindre relation ni dans le milieu éditorial ni dans le cercle des personnes célèbres ou influentes, et bien sûr sans-le-sou, les chances de séduire un éditeur relèvent pratiquement du miracle.
Et pourtant…
Ce n’est pas UN, ni deux, ni trois, mais bien quatre éditeurs qui se sont déclarés intéressés par ce roman !!!

Bon, il faut dire que j’avais mis toutes les chances de mon côté.

Un manuscrit soigné.

Le texte, d’abord. Relu et travaillé avec attention, il a d’abord été proposé sur une plate-forme de lecture à des tiers dont j’ai pris en compte les remarques et critiques avec intérêt (et reconnaissance). De mon point de vue, toute critique, lorsqu’elle n’est ni malveillante ni incongrue, peut être constructive. Ces commentaires m’ont permis de revoir le texte une nouvelle fois, de manière plus neutre et détachée.

Le titre également a été modifié à plusieurs reprises. C’est d’ailleurs, je crois, ce qui a été le plus difficile : trouver le titre idéal pour ce roman atypique !

Des éditeurs minutieusement sélectionnés.

Le travail suivant portait sur le choix des éditeurs, et cela non plus n’a pas été une mince affaire. J’ai ciblé très soigneusement les maisons qui me semblaient les plus pertinentes pour porter ce roman.

Ce qui importe, ce n’est pas la taille de l’éditeur (certains jeunes auteurs ne rechercheront que parmi les plus grands, d’autres penseront avoir plus de chance auprès des petits, la majorité quant à elle visera ceux de taille moyenne), c’est ce que la maison publie.

Parfois cela semble facile, l’éditeur affichant clairement sa ligne éditoriale ; parfois c’est plus compliqué et il faut feuilleter leur catalogue pour essayer d’y reconnaître des affinités avec votre propre texte…

Alors seulement, on passe aux envois. D’abord par papier, parce que cela en impose.
Mais si comme moi vous habitez en province, l’enthousiasme ne dure pas bien longtemps : 6,70 € de frais de port ! Sans compter l’enveloppe, les photocopies et éventuellement la reliure ! De fait, après le septième envoi, j’ai stratégiquement opté pour les éditeurs acceptant les manuscrits par mail, ce qui finalement soulageait autant ma bourse que ma conscience écologique…

L’attente.

L’attente a été de courte durée : le premier refus est arrivé des Forges de Vulcain tout juste quatre jours après ma première fournée d’envois en courrier électronique, par un message au demeurant très sympathique :

   «Bonjour Emmanuelle, Après examen, je dois décliner votre proposition. Votre texte ne correspond pas au genre de textes que nous désirons publier et défendre. Je vous souhaite courage et succès dans la quête d'un éditeur. Notez, mais vous le savez peut-être déjà, que non seulement les éditeurs se trompent souvent, mais en outre, qu'une décision négative est souvent l'effet de plusieurs choses, dont la qualité du texte n'est que rarement un paramètre (il y a aussi la ligne de l'éditeur, la cohérence du catalogue, l'état d'avancement de son catalogue...). Cordialement. »

Cela avait le mérite de clarifier d'emblée les choses et les retours suivant, qui se sont étalé jusqu'en juin, ont souvent conforté cette affirmation, même si certaines réponses m'ont parfois laissée perplexe, comme ce second refus, qui m'est parvenu par courrier fin janvier et qui émanait des Editions de l'Atelier :

    «Malgré l'intérêt de votre propos et la force de votre sujet, votre projet nous a semblé trop éloigné de notre ligne éditoriale pour que nous puissions envisager de le publier.»

Je croyais au contraire être en plein dedans, puisque les Editions de l'Atelier prétendent s'attacher «à mettre en valeur les expériences humaines afin d'analyser les grandes questions de société, décrypter le passé, inventer le présent. Les ouvrages visent à accroître la capacité de chacun à être acteur et à favoriser la transformation du monde vers plus de démocratie, de justice, de fraternité.»

J'ai dû mal interpréter leur ligne éditoriale, ou mal comprendre mon propre texte !!!;)

De fait et en dépit du grand soin que j'avais pris à sélectionner mes éditeurs, cette justification de la ligne éditoriale ou de la cohérence du catalogue est à plusieurs reprises revenue pour excuser les refus:

    «Nous vous remercions pour l'envoi de votre manuscrit. En dépit de certaines qualités, il ne peut cependant pas s’intégrer dans notre catalogue. Nous vous souhaitons bonne chance dans votre recherche d’éditeur.» (Service éditorial du Rouergue) 
              «Malheureusement, notre production étant très réduite, nos choix en sont d’autant plus restrictifs. Ainsi nous a-t-il semblé que votre livre ne correspondait pas à ce que nous recherchons pour nos collections.» (P.O.L Editeur)

   «Les thématiques abordées tout au long du manuscrit ne correspondent pas à la ligne éditoriale des éditions La DOXA.»

Autre argument de refus, souvent évoqué, la saturation des publications :

   « Les impératifs spécifiques de nos collections, d’une part, et un programme de publications trop chargé, d’autre part, nous obligent à des choix sévères, qui parfois nous laissent à nous même des regrets.» (Éditions Albin Michel)

   «Votre manuscrit n’a pas été retenu et nous en sommes désolés, sachant que cette décision vous décevra. Notre choix est d’autant plus subjectif que nous publions très peu de livres. Et le nombre croissant des manuscrits qui nous sont adressés nous contraint à ce courrier aussi bref qu’impersonnel, veuillez nous en excuser.» (Editions Zulma)

    «Nous ne publions que très peu de romans et malheureusement sommes très chargés en ce moment. De plus, nous avons récemment édité un témoignage illustrant la culture amérindienne dont un public suffisant a été difficile à trouver.» (Editions Favre)

«Nous publions peu de titres par an et nous n’avons pas retenu votre texte.» (Don Quichotte)

Bon, rassurez-vous, dans le lot, il y a quand même bien quelques éditeurs qui ont refusé mon manuscrit simplement parce que celui-ci ne leur avait pas plu. Si, si :

« Nos lecteurs ont pris connaissance de votre manuscrit. L’avis qu’ils ont rendu n’est malheureusement pas favorable et il ne nous sera pas possible de retenir cet ouvrage pour nos prochains programmes.» (Éditions Gallimard)

«Nous en avons pris connaissance avec une attention toute particulière. Malheureusement, il ne nous a pas pleinement convaincus.» (Editions Kero)

«Nous avons le regret de vous informer que votre manuscrit n’a pas été retenu par notre comité éditorial.» (Les Allusifs)

Sans oublier la réponse des Editions du Dilettante, qui m’a bien fait rire et mes lecteurs en jugeront par eux-mêmes :

«Si l’histoire est originale, on peine à partager l’expérience du narrateur, à cause d’une écriture qui manque de souffle et de caractère.»

D’autres, enfin, ont dû en débattre au sein de leur comité de lecture :

   «
Nous vous remercions d'avoir eu la gentillesse de nous envoyer votre manuscrit, et de la confiance que vous nous accordez. Malheureusement notre comité de lecture ne l'a pas retenu pour publication. En effet, vous le savez, un éditeur ne doit s'engager sur une publication que s'il est certain que toute l'équipe suivra, et mènera le texte aussi loin que possible ; ce qui n'a pas été le cas de tous les membres du comité, malgré les qualités de votre travail. Nous espérons que vous trouverez chez un confrère un accompagnement de valeur, et nous vous prions d'agréer, nos respectueuses salutations.
» (Allary Editions)
 
«A regret, notre comité éditorial a décidé de ne pas retenir votre manuscrit.» (Editions du Cygne)


Non pas UN, ni deux, ni trois, mais quatre éditeurs intéressés par ce roman !!!

Et puis courant mai, une première touche, émanant des éditions Yovana:

   «Après avoir effectué une première lecture, je vous avouerai que ma curiosité a été assez vite piquée. Votre narration est bien construite, votre sujet est prenant : vous proposez là un projet d'écriture d'envergure, qui ne laisse pas indifférent.[…] Lorsqu'une première lecture attire mon attention, je la soumets à un comité de lecture, avec lequel nous débattons ensuite d'une éventuelle publication. Mais peut-être êtes-vous déjà familière du monde de l'édition : je vous fais seulement part de ce processus pour vous préciser que ce courriel n'est pas encore celui d'un éditeur "en affaires", mais d'un lecteur enthousiaste.»

Certes cela ne vaut pas offre d’édition, mais c’est encourageant et cela redonne le sourire.

Cependant les semaines passent, et finalement l’offre espérée vient d’ailleurs, plus précisément des éditions La Völva, une jeune maison d’édition implantée à Besançon, la ville où j’ai fait mes études et à laquelle je suis encore très attachée :

   «Je me permets de vous écrire car nous aimerions convenir d'un entretien téléphonique avec vous pour discuter de votre soumission de manuscrit. Nous serions intéressés par une éventuelle publication mais nous souhaiterions voir certains points avec vous. Pourrions-nous convenir d'un entretien téléphonique prochainement ?»

Rendez-vous est pris. Et c’est un… essai transformé !, l’entretien téléphonique débouchant sur une offre concrète de publication. Cependant, en dépit d’un extrême état de jubilation que tout auteur en quête d’éditeur pourra comprendre, je reste prudente, souhaitant un délai de réflexion avant de confirmer mon engagement.

Bien m’en a pris, car le 17 juillet, Yovana se déclare :

«Je reviens vers vous pour vous faire part de notre décision autour de votre manuscrit. Tous les échos de mon comité de lecture ont été très positifs, et ont donc conforté mon souhait de démarrer cette aventure littéraire avec vous.»

Je suis ravie, bien sûr, mais l’idée de devoir choisir ou plus exactement l’idée de devoir écarter l’une de ces deux maisons d’édition prêtes à nous faire confiance, à mon roman et à moi-même, me désole.

Je me donne jusqu’à la mi-août pour étudier les propositions, consciente néanmoins que repousser l’échéance ne rendra pas pour autant les choses plus faciles.

En attendant j’adresse un mail aux éditeurs à qui j’ai déjà soumis mon manuscrit et qui ne m’ont pas encore répondu pour leur signaler ma nouvelle situation, afin qu’ils puissent retirer ce roman de leur circuit si le texte n'a pas encore été soumis à leur comité de lecture ou si ils ne sont pas intéressées pour le porter.

La réaction des Editions Mon Village est quasi immédiate :

   «J’ai lu votre manuscrit avec grand plaisir et serais intéressé par sa publication. Mais il circule encore auprès de notre comité de lecture et je ne pourrai vous donner de réponse avant mi-août. Je vous suis gré de patienter jusque-là, puis de faire votre choix, puisque vous avez le bonheur d’avoir le choix. »

Là, c’est carrément l’euphorie. Les éditions Mon Village, je les connais bien : elles ont porté André Besson dont les nombreux succès ont jalonné toute ma jeunesse et l’idée de voir mon nom associé à ce formidable auteur me porte littéralement aux nues.

La quatrième maison intéressée par mon manuscrit, les éditions du Menhir, n’a pas pu se positionner faute de temps pour examiner le manuscrit, mais c’est avec beaucoup de plaisir que je découvre leur réponse :

   «Je vous sais gré de nous avoir informé de cette situation. Tout en étant contrit de ne pas avoir pu disposer du temps utile pour examiner votre manuscrit, que nous avions classé dans la catégorie des "intéressants", je suis heureux pour vous que vous ayez reçu des offres de publication, et je vous souhaite tout le succès que vous méritez pour ce livre.»

J’ai également apprécié la réponse des Editions Lettres Vives:

«Je viens de regarder votre manuscrit et ne suis pas étonnée qu'il puisse retenir l'attention de deux éditeurs», précisant néanmoins que je frappais à la mauvaise porte «pour une question d'orientation et de choix éditoriaux».

Fière !

Au total Celui-qui-Doute a essuyé 15 refus formels (courrier postal ou électronique) avant de recevoir sa première offre de publication !

15 refus, c’est aussi bien que Le journal d’Anne Franck, et bien mieux qu’Autant en emporte le vent (38 refus, et pourtant Prix Pulitzer et record des ventes avec 33 millions d'exemplaires!), c’est également mieux que Dune (19 refus) ou Sa majesté des mouches (20 refus), mais – restons modeste – tout de même moins bien qu’Harry Potter (12 refus) ou que Twilight (14 refus)…

Et il n’en resta qu’un…

Avoir le choix, certes, c’est flatteur pour votre ego. Mais pour moi, ce fut un crève-cœur de devoir contacter l’un de mes prétendants pour lui dire : «Je vous remercie, mais finalement, c’est l’autre que j’ai choisi.» Parce que même si vous y mettez les formes et que vous emballez vos propos dans un joli paquet cadeau enrubanné, en définitive, c’est bien ce que votre interlocuteur retiendra.

Le choix a été difficile, pour ne pas dire douloureux, mais j’ai finalement fini par me décider pour les éditions Yovana, une toute jeune maison d’édition, certes, mais prometteuse. Et puis surtout j’avais dans ma besace d’autres projets que ce premier manuscrit et parfois il faut savoir regarder plus loin que la ligne de l’horizon, quitte à prendre des risques.
Car l’aventure ne fait que commencer ! »


dimanche 18 décembre 2016

EXTRAIT CHAPITRE I

 
"Je marche depuis le matin au cœur d’une plaine aride qui semble se fondre à l’infini. Le soleil au fil des heures s’est fait de plus en plus cuisant.
Inondée de chaleur, la terre desséchée évacue sa transpiration en ondes diffuses qui brouillent le regard. Le paysage n’est plus qu’un leurre immense, noyé dans une luminosité éblouissante qui abuse mes sens. Même mon passage dans ce semis d’ocres ternes qui avale les empreintes de mes pas pourrait être un mirage.
Les morsures du soleil sur ma peau sont pourtant bien réelles, et je donnerais mes mocassins pour pouvoir confier mon corps irradié à l’oasis d’un bouquet d’épineux ou au cœur ombragé d’une composition de rochers. Mais les collines verdoyantes qui se découpaient ce matin encore derrière moi ont fini par disparaître du regard, et le relief s’est métamorphosé sans même que je m’en aperçoive.
À présent, je ne chemine plus qu’à travers une terre brûlée, modulée de dunes revêches et parcimonieusement tapissée d’une végétation rude et jaunie. Pas l’ombre d’un arbre, d’un buisson, ni même d’un nuage. Aveuglant de lumière, un ciel compact se mêle à l’atmosphère incandescente dans une étreinte qui semble vouloir écraser l’horizon.
Un vent taquin m’accompagne. Il a l’audace de l’enfant qui s’imagine que le monde lui appartient. Je m’attends à le voir s’élancer d’un souffle décidé à l’assaut du ciel, mais il semble pour l’instant plutôt enclin à balayer le sol cuivré dont il sonde les aspérités et les craquelures, soulevant dans mon sillage une poussière dorée.

            J’épouse intérieurement cette étendue austère qui s’étire à perte de vue. Des pensées et des images sans suite me traversent, fugaces ; elles m’effleurent comme une caresse puis se dérobent, s’envolent et disparaissent. Je me réfugie dans le néant de mon âme pour échapper à la fournaise, essayant d’oublier que la seule chose qui me reste à faire, c’est de mettre un pied devant l’autre. Chaque pas est devenu automatique, lancinant, presque réglé comme un métronome ; chaque respiration m’est comptée.
Je me sens vulnérable, écrasé de solitude. La faim qui commence à se faire sentir me semble presque incongrue dans ce vide enivrant. Les quelques baies qui ont constitué mon déjeuner sont digérées depuis longtemps déjà. Bien sûr, le contenu du parflèche (1) qui pèse à mon côté pourrait taire les protestations de mon estomac, mais j’ai déjà commencé à préparer le jeûne qui m’attend."

(1) Sacoche plate en peau de bison ou d’élan.